Fournes pendant la Révolution

La Révolution Française 1789-1799 supprime les seigneuries et baillages, nationalise les biens de l’église, crée l’assignat et décrète la constitution civile du clergé.
Dès 1789, Fournes n’est pas épargné par la Révolution.
Hyppolite Charlet, ancien bailli du seigneur de Fournes, 1er maire élu en 1790, ne pouvant résister à la révolution qui s’accentuait davantage à Fournes et ne voulant plus aller contre sa conscience, donna sa démission après 15 jours.
Il fut remplacé par Philippe Raymond Cuvelier, puis un an plus tard par Pierre Joseph Catteaux. Ce dernier resta cinq ans en fonction pendant les plus mauvais jours de la Révolution.
Lui succéda à nouveau Philippe Cuvelier de 1796 à 1799 et Nicolas Delfosse termina la période révolutionnaire.
Sauf Hyppolite Charlet, tous furent acquéreurs de biens ecclésiastiques ou d’émigrés et furent des révolutionnaires enragés.

En 1789, le curé de Fournes était Mr Taffin. Entré le 24 juin 1789, il avait pris possession de sa cure, lorsque déjà les esprits étaient exaltés par les idées de la révolution naissante. Il refusa le serment (la loi du serment obligeait les prêtres ayant un ministère à jurer la Constitution) et abandonna sa paroisse en mars 1790 pour prendre le chemin de l’exil. Il avait caché avant son départ les vases sacrés de son église. Il fut accusé plus tard par le curé institutionnel, Mr Delaplace, de les avoir dérobés. Ce dernier prit possession de sa cure usurpée pendant la semaine de la passion 1790. On ne savait rien de ses antécédents, ni quelles fonctions il avait exercé avant de venir à Fournes. Il eut pour auxiliaires assermentés comme lui, Mr Lemosne puis Mr Crespel. Il y resta 3 ans et fut remplacé par plusieurs autres prêtres du « même genre ».
Si un certain nombre d’habitants acceptaient les secours de la religion des mains des prêtres assermentés, il est prouvé que d’autres refusaient énergiquement l’intervention de ces prêtres institutionnels au moment de leur mort. En punition de leur manque d’obéissance aux lois tyranniques, la municipalité les faisait enterrer civilement.
L’an 1792, 1er de la République Française, le 12 Novembre, les citoyens Pierre François Eugène Carpentier, commandant la Garde Nationale et Adrien Tilloy, tous deux notables de Fournes, pénétrèrent dans l’église de Fournes pour y inventorier tous les biens afin de satisfaire à la Loi du 10 septembre 1792. On y trouva 87 onces d’argent, 1 once ¼ d’or qu’on envoya à la Monnaie de Lille et des bijoux qu’on vendit à Fournes pour acheter les vases sacrés nécessaires au culte constitutionnel.
Tilloy et Carpentier dépouillèrent l’église. Les ornements furent transformés en vêtements, le baptistère en cuivre et les quatre plus petites cloches furent envoyées à Lille pour y être converties en monnaie. On réserva cependant pour les solennités publiques et les jours de Decadi (10ème jour chômé du calendrier républicain) la plus grosse cloche pesant 3000 livres. Une femme prénommée Henriette, impie et méchante, chargée des sonneries, entoura la cloche d’un cordon et la fit sonner en cet état ; elle se fêla aussitôt et se brisa. Les débris livrés à la Monnaie, on obtint en échange, l’une des trois cloches du Maisnil qui subsista jusqu’en 1878. L’église dépouillée fut vendue à un certain Durot de Wazemmes pour la modique somme de 425 Frs, par adjudication du 24 Floréal, an7.
On avait enlevé toutes les statues qu’on mutila à coups de sabre et on les jeta dans un jardin voisin. L’antique statue du Dieu de Pitié fut oubliée. Celle de Notre-Dame des Sept Douleurs fut sauvée bien que mutilée. Par un bonheur inespéré, la statue de Notre - Dame de Fournes resta dans sa niche sans que nulle personne n’y porte les mains.
Du cimetière, on exhuma et jeta au vent les cendres des sires de Rouvroy, anciens seigneurs de Fournes.
L’église servait de lieu de réunion aux membres de la Société Populaire et Révolutionnaire. Le culte de la déesse Raison fut instauré dans le Lieu Saint. La chaire était utilisée comme tribune : les patriotes y dénonçaient ceux qui refusaient les assignats ou qui respectaient encore le dimanche, dédaignant les « Decadi ». Des listes de suspects étaient établies pour être livrées au Comité du Salut Public. L’esprit révolutionnaire avait envahi un grand nombre des habitants de Fournes. Parmi les plus exaltés, on remarquait le citoyen Quempe, clerc constitutionnel et instituteur, ainsi que Carpentier, célèbre pour ses impiétés et les attentats sacrilèges qu’il commit dans l’église.
A cette époque, des bandes de brigands connus sous le nom de chauffeurs, parcouraient le pays et jetaient l’épouvante dans les fermes et les maisons isolées. Ils « chauffaient » à la flamme du foyer les pieds de leurs victimes jusqu’à ce que celles-ci leur fissent connaître le lieu où se trouvait caché l’argent de la maison.
La grande majorité des habitants était lasse de ces temps d’anarchie et souhaitaient des jours plus tranquilles.
A la fin des persécutions religieuses, les Fournois s’empressèrent de racheter et de restaurer l’église au moyen de souscriptions qui recueillirent 1212.3Frs.
Ainsi se terminaient les tristes jours de la révolution.